Les
hommes font tous grand cas de ce que leur connaissance connaît, nul ne
sait ce que c'est que connaître en prenant appui sur ce que la
connaissance ne connaît pas.
N'est-ce pas là grande source d'erreur?
Tchouang-tseu
LI
Le
terme LI signifie force. Cette force est élastique, souple,
continue, globale, sans brutalité. Elle est mise en place
lors de la coordination articulaire et musculaire liée à une activité
mentale.
La coordination des "Trois harmonies
externes" : cheville /poignet, coude/genou, hanche/dos permet cette synergie
musculaire et articulaire.
La force est à la fois changeante et homogène, douce et
explosive grâce au contrôle du tonus musculaire (du relâchement à la
tension).
Cette force recherchée est une force sensuelle, animale, instinctive.
Elle
met en jeu plusieurs sens : le toucher, la vue, l'ouie et la
sensibilité proprioceptive des muscles.
SHI-LI peut
être traduit par :
"
Rechercher et essayer la force vivante
à travers des mouvements du corps entier (zheng-ti)"
La
lenteur
Pour
ressentir cette "force", la lenteur est la base
des mouvements. La sensibilisation et l'harmonisation se créent avec
patience. Au début de l'apprentissage, les mouvements se font
lentement, puis la vitesse varie selon la volonté. La
vitesse naît de la lenteur grâce aux sensations fine des appuis, de
l'espace et de la globalité du corps.
Zhan
zhuang et
shi-li
Les
essais de force suivent les micro-mouvements créés dans la
posture de l'arbre. Le zhan zhuang est l'étude des
appuis et de l'essence de la force. La force émane des pieds, qui
donnent l'impulsion et la direction transmises ensuite aux genoux et
aux hanches.
Les directions de force (haut, bas, derrière, devant, gauche, droite)
étudiées en posture servent de support à la réalisation des Shi-li.
Un shi-li est toujours lié à deux forces minimum :
Pour un mouvement vers l'avant, il faut pousser le pied dans la
terre et vers l'arrière. L'arrière et l'avant sont des forces opposées qui
créent une élasticité.
Le zhan zhuang et les shi-li forment un duo
inséparable.
Le
yi et les
Shi-li
La
pensée créatrice (yi) doit être présente dans chaque shi-li pour créer
l'unité du corps et de l'esprit. Cette pensée crée une image mentale qui
permet de visualiser une action imaginaire
Exemple : "saisir un ballon et le faire rouler sur l'eau".
Cette image mentale permet de lier une sensation interne à une action
extérieure et d'en ressentir la "réalité"(consistance de l'eau,
forme du ballon...). Cette image aide à la création de gestes fluides.
Tous les sens sont en éveil : le toucher de l'espace, le
regard enveloppant, l'oreille attentive.
Le yiimplique la lenteur.
Yong
yi, bu yong li :
Utilisez le YI, n'utilisez pas la force brute
Variétés
des Shi-li, noms
et formes
Il
existe une grande variété de shi-li (mouvements avec la force globale)
On peut classer les mouvements en trois grandes parties progressives :
1. L'étude des directions simples
:
Haut, bas, derrière, devant, gauche et droite. Ces shi-li se font avec les deux mains dans la même
direction ou les mains en
opposition.
2. La combinaison de plusieurs directions
:
Mouvement arrondi ou circulaire.
3. L'étude des techniques de frappes
(art martial) :
Avec les poings, les mains, les bras et les pieds.
Le 1
et 2
servent à sentir
l'espace et sont la base du Yang Sheng Qi Gong du Yi Quan.
Chaque
shi-li porte le nom de la pensée créatrice, qui peut varier
sensiblement suivant
l'image mentale.
Descriptions des mouvements de base :
"Pousser l'océan"
Ce shi-li est l'étude de la fermeture et de l'ouverture. On pousse l'eau
devant soi (fermeture). Cette image sensibilise l'intérieur des bras
et de la poitrine. L'ouverture se fait avec le dos sans lever les
épaules.
"Tirer
la planche sur l'eau"
Etude des directions avant et arrière. L'image de la planche
permet de sentir les mains, l'eau soutenant la planche. Une image d'élastiques au bout des doigts
aide à ressentir le geste élastique horizontal.
"Monter
et descendre la planche sur l'eau"
Ce mouvement est la combinaison de la direction vers le haut puis devant,
vers le bas puis derrière. Le geste est arrondi, avec les mains à l'horizontale
(sur
la planche).
"
Tirer puis pousser le ballon sur l'eau"
Combinaison de la force vers l'avant et vers l'arrière avec un mouvement
arrondi en tenant le ballon. L'image est le support de la sensation de
la présence du ballon sur l'eau.
Il existe d'autres shi-li plus complexes dans des combinaisons de direction
:
"Rouler le ballon devant soi"
Ce mouvement crée la force circulaire, "Faire rentrer la planche dans l'eau "
Ce geste est l'étude de la force circulaire puis descendante du corps, "Faire rouler le ballon devant soi sur les avant-bras" Ce shi-li est le geste spirale de base pour les tui shou à deux mains.
Description
des techniques de frappe:
Coups
de poings
Il existe 4 coups de poings de base : direct, côté, remontant,
descendant.
Pour effectuer ces 4 shi-li, le poing n'est pas serré (comme si on tenait un oiseau).
On imagine des élastiques entre les deux poings.
Couper
la pâte de soja
Ce sont les mouvements de frappes avec le bras, la main, la paume.
L'image de la pâte de soja (ou de la guimauve) permet de sensibiliser le bras et de remplir
l'espace. Il existe 3 types de frappe : de haut et bas, horizontalement, et en diagonale.
Coups
de pieds
Les mouvements se font sur une jambe au niveau bas (genoux). La jambe tire un
élastique imaginaire.
Les
shi-li peuvent se faire seul ou avec un partenaire pour l'application en
tui shou ou en combat. Ils peuvent se faire sur place et en déplacement.
Ils se pratiquent en posture pieds parallèles, en posture de combat et
en déplacement.
Les shi-li sont la base des parades (absorption et déviation) du yi
quan.
Application
à deux d'un Shi Li
par
Ilias Calimintzos
La
simplicité extérieure des formes
Comme
vous pouvez le voir sur les gifs animés, les formes extérieures sont
simples, sans excès, il n'y a pas de position extrême.
Cette simplicité cache les difficultés internes, comme la découverte
de l'état de corps (de la détente à la tension), la sensation du
corps par rapport à l'image (l'eau, les élastiques..), la perception
de l'extérieur grâce aux objets imaginés.
L'image est un moyen de percevoir et de réagir à notre espace vital.
Elle disparaît petit à petit et le corps se conforme aux lois de la
nature (équilibre, plein, détente, tension, douceur, force).
L'enchaînement libre des shi-li dans n'importe quel ordre, suivant
notre envie et notre création, s'appelle Jian wu (danse de
santé)
ou Quan wu (danse de la boxe).
Le
Neijing
On
cherche à travers les shili à développer le neijing
( puissance ou
force interne). Cette puissance se développe grâce à l'introspection,
en liaison avec l'extérieur par l'intermédiaire de nos sens.
La sensation de l'espace qui nous soutient et des points d'appuis crée
une grande disponibilité.
Cet état nous conduit à la spontanéité des gestes.
Le neijing découle du naturel acquis par l'apprentissage minutieux de
l'ensemble des possibilités du corps.
"
J'ai grandi dans l'eau et je m'y suis senti à l'aise :
Voilà le
naturel
"J'ignore pourquoi j'agis comme je le fais :
Voilà la nécessité"
Tchouang-tseu