Le
terme Gong-fu (kung fu) ne désigne ni un style, ni une école. Il est utilisé
en Chinois pour signifier : temps ou effort dans un travail ou exercice,
habilité, compétence, virtuosité, maîtrise, exercice de qualité.
Les films de Hong Kong ont contribué au succès mondial du nom
"kung-fu". Ce nom est malheureusement utilisé aujourd'hui dans le
sens de boxe chinoise. En Chine populaire, on préfère l'expression "wushu"
(art / technique martiale), plus précise que le terme "gong fu".
La
boxe de la paume des huit trigrammes
"Bagua zhang"
Wu
Shu
Ce
terme, officialisé en République populaire de Chine, est apparu au 5ème
siècle.Il désigne l'ensemble des arts martiaux chinois. A Taiwan, on utilise
encore le terme Guoshu (arts nationaux). Des noms anciens comme quanfa
(technique de boxe), quanshu (art de la boxe), jiji (frapper avec dextérité)
sont aussi utilisés. Le wushu regroupe toutes les écoles (nord, sud, shaolin,
wudang, emei) et plus de 350 styles (mains nues et avec armes).
La
boxe du dos traversé
"Tongbei quan"
Les
boxes chinoises
Avec
cette multitude de styles, il n'existe pas d'uniformité en boxe chinoise. De
nombreuses boxes sont issues du cercle familial. La transmission s'effectuait
de maître à disciples. On retrouve aujourd'hui des styles anciens et
modernes. La plupart des boxes sont désignées par quan (boxe, poing),
men
(école, style), pai (courant, école).
Exemple: Nan quan (boxe du sud), chang quan (la longue boxe), shaolin pai (le
courant de shaolin), ziran men (école naturelle).
La
boxe de Shaolin
"Luohan quan"
Classification
des boxes
Il
existe plusieurs classements pour les arts martiaux chinois.
Le premier est géographique :
Les boxes du sud (nan quan)
Les boxes du nord (bei quan)
On trouve ce dicton "nan quan bei tui" : poings dans le sud, jambes
dans le nord.
En vérité, la réalité est plus complexe, on trouve dans le
nord des styles utilisant essentiellement les mains / poings comme par exemple
le xing yi quan (boxe de la forme et de la pensée) et dans le sud le style
"gou quan" (boxe du chien) assied sa stratégie sur les coups de
pieds. Disons que les styles du nord (bei quan) se caractérisent par des
mouvements amples et un relâchement du corps, les styles du sud ont
des
mouvements plus courts avec endurcissement du corps.
La
boxe de la province de Guandong
"Bak mei / bai mei quan"
Le
deuxième classement est apparu au 19ème siècle :
La famille des boxes externes (waijia) :
Boxe de shaolin et toutes les autres boxes
La
boxe de la forme et de la pensée
"Xing yi quan"
Suivant la légende, les boxes externes seraient nées au monastère de
shaolin
(bouddhiste) et utiliseraient la force musculaire.
Les boxes internes auraient pour origine le mont Wudang (taoîste) et
utiliseraient la force interne (qi).
Ceci est très simpliste, car on sait aujourd'hui que les écoles internes ne
sont pas nées sur le mont wudang et utilisent aussi bien la force musculaire
que le qi.
Cette classification est aléatoire, la plupart des styles externes
n'ont pas comme origine le temple shaolin.
Cette répartition interne / externe fût mise au point à Pekin en 1894 et
diffusée par les professeurs de boxes dites internes.
Un
troisième classement peu se faire aujourd'hui :
Les boxes anciennes traditionnelles
Les boxes modernes sportives
A partir de 1949, le wushu se modernisa selon deux axes, les exercices de
santé (qi gong) et le sport. Certaines pratiques martiales comme le taiji
quan ont subi une transformation pour devenir "une gymnastique douce de
santé" (en gardant parfois l'entraînement martial).
Certains styles comme le nanquan moderne sont devenus des boxes de
démonstration n'ayant que peu d'applications martiales. Des boxes sportives
ont été créées pour accentuer le dynamisme et le spectacle comme le chang
quan (boxe à longue distance).
La
boxe style yihe quan
"meihua zhang"
Le
wushu et le sport
A
l'origine, tous les arts martiaux était des arts guerriers. La première
classification date de la dynastie Ming (1368-1644). L'escrime et le tir à
l'arc furent pendant de nombreux siècles les principales disciplines du
guerrier chinois (les 18 armes: arc, arbalète, lance, sabre, épée, pique,
bouclier, hache, fourche...).
Les arts martiaux à mains nues se sont vraiment
constitués à partir de l'époque Ming. Contrairement au Japon, les
militaires n'ont pas eu le monopole du wushu. Les couches populaires paysannes
puis les lettrés ont été un vecteur important pour le développement du
wushu. Les sociétés secrètes (la révolte des boxeurs en 1900) ont joué
aussi un rôle dans l'histoire du wushu.
L'influence
occidentale des années 1900 à travers le renouveau sportif (jeux olympiques)
a lancé véritablement la transformation des arts martiaux en culture
athlétique nationale.
De nombreuses écoles se sont créees pour
diffuser et vulgariser les arts martiaux (le jingwu tiyu hui à Shangai en
1909 et le zhongyang guoshu guan à nanjing en 1927). Cela a amené de
nombreuses modifications dans les styles traditionnels afin d'en faire
une
éducation physique (mouvements plus simples, postures plus basses). Les
mouvements devenaient moins efficaces mais plus sportifs.
En
1928, la première compétition de combat à mains nues au niveau national a
été mise en place par "l'institut central de l'art national" (zhonggyang
guoshu guan) à Nanjing. Les combats (sanshou) se déroulaient sur une estrade
(leitai), sans catégorie de poids ni gants. Le résultats fut malheureux, le
nombre élevé de blessures obligeant les organisateurs à arrêter la
compétition.
Aujourd'hui après une longue période d'interdiction, les compétitions de
combat libre (sanda) sont de nouveau autorisées en Chine (avec des
protections).
Le Wushu
en France
On retrouve en France la même classification des styles qu'en Chine.
L'avènement du Qi Gong en Chine en 1950 a ajouter une nouvelle famille :
"Les arts énergétiques chinois" dont la source ne vient pas
seulement du wushu mais certaines formes / mouvements proviennent du
patrimoine des arts martiaux.
Arts
martiaux externes : shaolin quan, wing chun, shuaï jiao, nan quan, chang quan
Boxe
de Shaolin en Application "self-défense"
Ces
arts sont réglementés par l'état
(diplômes, grades, compétitions)
L'enseignement
La diversité des styles de boxes permet de trouver divers schéma pédagogiques,
stratégiques et tactiques. Aujourd'hui l'enseignement maître et disciple est
rare, il faut que le maître ait été lui-même disciple et ait reçu un
enseignement traditionnel. Les professeurs, éducateurs et moniteurs ont
acquis leur savoir pédagogique dans une école chinoise ou en ayant suivi une
formation pédagogique en France.
En wushu, il existe différents types de cours. On discerne des cours de
bien-être basés sur le calme et la sensation du qi, des cours d'arts anciens
avec application martiale et des cours de "wushu moderne" plein
d'acrobaties, de sauts et d'amplitude et des cours de combat libre (sanda).
La
compétition
En
Chine, la lutte fut le premier art martial (dynastie des Qin 221-207 avant J-C)
pratiqué en tournois avec un arbitre. Aujourd'hui en wushu, il existe une
multitude de disciplines compétitives.
En France, on pratique des compétitions reconnues par la fédération
internationale (IWUF) et des formes compétitives spécifiques à des styles
ou à la France.
Au niveau chinois et international, le classement des compétitions reflète
la diversité des pratiques : Formes à mains nues :
Techniques du nord
Techniques du sud
Taiji quan forme 42
Combat technique combiné en duo pré-arrangé.
Forme
avec armes :
Épée, sabre du nord et du sud, lance, épée de taiji, bâton du sud et du
nord, soit 11 catégories techniques.
Compétition
combat : Sanda : combat libre avec protections (casque, plastron, protége
tibia, gants de boxe). Le combat sanda est la forme
de combat chinois au niveau international.
Les
tui shou ne sont pas représentés au niveau international car ils sont
réservés aux initiés des styles internes. Les critères de jugement en tui
shou ne sont pas abordables pour le grand public. Les interdits (projections,
frappes, saisies) des tui shou sportifs ne permettent pas une vision clair du
perdant et du gagnant. A l'origine, les tui shou ne sont pas le combat mais
des exercices pour étudier les directions de force avec un partenaire.
Avenir du
wushu
Aujourd'hui
coexistent les pratiques anciennes et les pratiquesmodernes
sportives. Les pratiques anciennes n'ont pas pour vocation la pratique compétitive.
Elles cherchent surtout l'efficacité dans le temps et le développement
personnel suivant la vision chinoise de l'homme. Si
les pratiques modernes et sportives prennent le dessus dans l 'extension du wushu,
les arts martiaux deviendront des "sports athlétiques" réservés
à une élite jeune. La nouvelle fédération des arts martiaux
chinois devra maintenir cette équilibre entre les arts anciens
et modernes pour garder la richesse du wushu.
La saison 2014-2015 pour
le Wushu en France commence sous de mauvais augure. Les dirigeants de la
FFWUSHU ont décidé de se séparer de la partie sportive du Wushu (sanda,
taolu).
On retourne 20 ans en arrière puisque le Ministère des Sports a
choisi la Fédération de Karate pour l’organisation du Wushu sportif. Ce
choix est un mauvais choix pour l’avenir . On ne doit pas séparer
le sport de compétition et les pratiques dites de tradition. Les jeunes
pratiquants sont l’avenir d’une fédération, à chaque âge sa
pratique. De plus aujourd’hui, les professeurs de Wushu enseignent aussi
bien les pratiques de santé (Qi Gong, Tai Ji , Dao Yin) que les pratiques
martiales et sportives.
L’expérience dans l’enseignement nous apprend que les arts martiaux
traditionnels sont pratiqués par des personnes de 30 à 90 ans. Aussi, si
dans une Fédération la possibilité de participer à des compétitions
n’est plus offerte aux jeunes adhérents, celle-ci verrouille son avenir
et se condamne au déclin.
Sources
pour ce texte: Dictionnaire des arts martiaux chinois
T. Dufresne et J.Nguyên Edition budostore épuisé
De
Shaolin à Wudang Les arts martiaux chinois
José Carmona
Guy trédaniel éditeur
Merci à Jean-Roger
Dimur pour les 18 saveurs du style Shaolin (Kung-Fu Wushu)